L’étreinte repris alors, Acedia souffla de soulagement. Toute la pression qui s’était exercé sur son corps qui se changeait malgré elle en pierre s’envolait de nouveau, lui laissant penser qu’elle était légère comme
une plume. Cet homme la soulevait sans mal, et pourtant, la jeune fille n’était pas petite, mais cette
brindille aurait pu se briser sous le souffle puissant de la brise maritime. S’envoler dans le ciel pendant une tempête aurait été possible pour elle. Le chemin reprit alors, plus rapide maintenant, le jeune homme sachant où il pouvait se rendre dans l’obscurité. Bientôt, les couloirs ne furent plus qu’un souvenir lointain, comme pris dans un songe éveillé. Toujours prise dans ces rêverie, la jeune fille perdait peut à peut le sens de la réalité. Peut être que ce monde était en fait un rêve éternel et que son âme était prisonnière de cet univers dépourvu de féminité ? Ce monde où subsistaient quelques anges déchus, comme sa protégée, Biga, et sa Rose. Ces petits oasis de féminité qui venait sublimer son cœur et son âme de tendres visions. Puis il y avait cet homme aux longs cils et aux traits fins. Acedia pensa à cet instant que cet homme pourrait faire un bon ami, bien que jamais elle n’avait côtoyé d’hommes au par avant, et que ces derniers ne l’intéressaient pas.
Quel cours pouvait-il bien diriger ? De la conviction au fond du regard, une pointe de courage, mais pourtant une grande douceur envers les élèves les plus difficiles…
A quel cours la jeune fille s’était-elle inscrite ? Acedia avait souvenir de ce jour lointain,
effacé par les nuits, où elle avait inscrit ses vœux sur cette feuille qui lui proposait différents cours. Elle en avait choisit d’après ces gouts, d’après ce qui aurait pu l’intéresser, sans grandes convictions… Un cours de littérature peut être ? Cela aurait pu être possible, cet homme paraissait cultivé après tout. Et cette culture était un atout. Un souvenir lui revint alors, une petite phrase que quelqu’un lui avait dit un jours : «
La culture est comme la mélodie de l’âme, jeune enfant. Plus son chant est harmonieux, plus ton esprit sera comblé. » C’était peut être pour cela que la jeune fille se plongeait dans les livres.
Mais cette flemme la rattrapait toujours, la privant de connaitre la fin. Un jour, ce tendre professeur entendrait parler de ces méfaits, et là, il comprendrait pourquoi il vaut mieux éviter le regard d’un Nahash. La jeune fille songeait, ne prêtant pas vraiment attention au chemin emprunté, plongeant son regard dans celui de l’astre céleste qui illuminait leur route. Le destin était un être sans doute masculin, vil et hideux, pourvu d’un sens de l’humour douteux, pensait la jeune fille. Réunir un professeur et une élève semeuse de trouble au même endroit, leurs faire partager un toit l’espace d’un soir… Une étrange idée de la couper de son idylle. Quelle ironie que voilà. Une petite crainte au fond du cœur : Les autres s’inquièteraient-elles de son absence ? Rose serait-elle triste ? La sanction de son absence serait-elle lourde ? Perdue dans ses pensées, le doux visage de la jeune fille ne trahissait en rien cette inquiétude, restant neutre, fascinée par la lumière de la lune, bercée par les pas de son professeur. La voix du jeune homme retentie alors, un peu hésitante, son maitre continuant toujours sa course : «
Appelle moi Odric, ici ou nulle part ailleurs, cela sera Odric. Seulement à l'école c'est M.Tiriel d'accord ? Ne laissons pas transparaître ce soir, dans notre comportement de profs à élèves. » Acedia acquiesça alors doucement d’un regard. « Odric ». Ce nom ne lui rappelait rien. Mais M.Tiriel, oui. Une preuve de plus qu’elle faisait partie de ses cours. Un petit souvenir de «
Inscription au cours de […] de M. Tiriel. », et d’une croix dans la case correspondant à ce cours. Le jeune homme poussa une porte, déposant alors le corps frêle de la jeune fille délicatement à terre. Elle parvenait mieux à marcher désormais, elle le suivit alors, un peu troublée par l’ambiance de la maison. Rien de beau. Rien de féminin. Comment diable pouvait-on habiter dans une maison de la sorte ? C’était là un défaut d’Acedia. Le beau est dans le féminin. Ce qui ne l’est pas n’est pas beau. Elle soupira doucement : Il n’y avait rien à faire, un invité ne peut se permettre de changer la demeure de son hôte. Le jeune homme reprit timidement : «
Je t'en prie entre, le salon est directement sur ta gauche. As-tu faim ? Je suppose que oui. Je vais préparer des pâtes carbonara. Si tu veux prendre une douche, va au premier, première porte à gauche, pour ce qui est d'un pyjama... Je te prêterais un de mes t-shirt, il devrait être bien assez grand. » Acedia eu alors un sourire discret. Le repas serait simple, mais pas pour le moins délicieux. La jeune fille remercia le professeur poliment, déclarant qu’elle irait prendre une douche avant de manger. Mais elle hésitât tout de même. Dormir dans les vêtements d’un homme ? Elle avait beau être un peu négligée, elle n’en restait pas moins féminine. Puis son souffle se coupa. «
De toute façon, je ne vais pas aller chercher quelque chose de mieux. Je n’en ai pas l’envie. Puis je n’en ai pas la force. »
Flemme. Comme toujours. Tant pis. Le jeune homme s’éclipsa, Acedia alla se laver.
L’eau. Quelle divine compagne que l’eau. Sa course,
ses courbes. Jamais un élément ne pu être si agréable sur la peau d’une femme, caressant chaque parcelles de son corps.
La jeune fille souriait. Ces tendres caresses lui firent oublier sa situation quelque peu coquasse. Elle remercierait du mieux qu’elle pourrait son professeur, si elle en trouvait la force. Sinon tant pis. Ce n’était pas la première fois que la jeune fille abandonnait un travail à son état embryonnaire. Mais l’idée d’assister à un cours n’était pas une mauvaise idée. Elle n’aurait qu’à se rendormir. La jeune fille coupa l’eau, se séchant délicatement les cheveux trempés grâce à une serviette emprunté à Odric, c’est nue, la serviette sur la tête, qu’elle contempla le t-shirt que le jeune homme lui avait laissé, du bout des doigts. Puis elle se résigna, l’enfilant avec ses sous vêtements. Elle entendit alors la voix du jeune homme qui l’appelait.
Serais-ce l’heure de passer à table ? Une gêne pris alors ces joues lorsqu’elle descendit les escaliers pour se retrouver devant Odric.
Jamais elle n’aurait penser être gênée d’être seule avec un homme.